Le tassement de l'inflation rend peu probable une revalorisation du SMIC d'ici à la fin de l'année, selon l'Insee. Le nouveau Premier ministre dispose de deux leviers s'il veut jouer sur le salaire minimum : un coup de pouce immédiat ou les préconisations du rapport Bozio-Wasmer.
Le travail doit payer plus. A peine nommé Premier ministre, Michel Barnier a repris cette revendication partagée par la classe politique dans son ensemble. L'amélioration du pouvoir d'achat peut passer par l'augmentation du SMIC pour tenir compte de l'inflation. Sauf que la stabilisation des prix à la consommation rend la perspective d'une hausse du salaire minimum légal - attendue à l'automne il y a quelques semaines encore - plus qu'incertaine, a indiqué l'Insee ce lundi en présentant sa dernière note de conjoncture .
Pour rappel, trois mécanismes légaux gouvernent les évolutions du SMIC. Le premier, tous les 1er janvier , dépend de deux paramètres : indice des prix à la consommation hors tabac du premier quintile de la distribution des niveaux de vie, auquel s'ajoute le pouvoir d'achat du salaire horaire de base des ouvriers et des employés.
Le deuxième mécanisme peut intervenir en cours d'année si ce même indice a augmenté d'au moins 2 % par rapport à sa valeur lors de la revalorisation précédente. Le SMIC augmente alors d'autant. Dernier mécanisme enfin, un coup de pouce décidé par le gouvernement à tout moment, le dernier remontant à 2012 peu après l'élection de François Hollande.
Coup de pouce ou pas coup de pouce ?Pour le premier mécanisme, on verra en toute fin d'année. Pour le deuxième, il faut que l'indice des prix en question dépasse 119,75. Il n'était « que » de 119,06 en juillet et il est peu probable que cela change en août - les chiffres du mois d'août seront connus ce vendredi - ou par la suite. « Au total, l'inflation resterait inférieure à +2 % d'ici à la fin de l'année, et s'établirait à +1,6 % sur un an en décembre 2024. L'inflation sous-jacente aurait un rythme comparable. Sous ces hypothèses, une revalorisation automatique du SMIC d'ici à la fin de l'année apparaît très incertaine », a confirmé l'Insee ce lundi matin.
Reste donc le coup de pouce. Lors des législatives, le Nouveau Front populaire a dégainé une mesure choc : +200 euros net, soit 1.600 euros par mois. L'alliance des gauches n'ayant pas réussi à porter Lucie Castets, sa candidate, à Matignon, le patronat respire : impossible de supporter une telle augmentation, a alerté encore récemment Michel Picon, le président de l'U2P, l'organisation des artisans, commerçants et professions libérales. « C'est la structure de la rémunération qu'il faut revoir », a-t-il plaidé, arguant qu'une hausse de 200 euros n'en « laisse » que 85 dans la poche du salarié quand elle en coûte 400 à son employeur, compte tenu des seuils d'allègement des charges, des barèmes de la prime d'activité et d'imposition sur le revenu.
Grilles écrasées
Revoir cette articulation qui a fait son temps, c'est tout l'enjeu du rapport Bozio-Wasmer . Sans attendre sa remise officielle, Gabriel Attal en a extirpé une mesure dont il a bien pris soin d'indiquer à son successeur qu'elle était sur son bureau.
Quelle suite Michel Barnier donnera-t-il à ce rapport très attendu par le monde économique ? S'il en reprend une mesure, pourra-t-elle s'appliquer rapidement ? Si tel n'est pas le cas, pourra-t-il éviter un coup de pouce, compte tenu des attentes des Français et de la pression des oppositions, NFP et RN en tête, sur le pouvoir d'achat ?
Une chose est sûre, les nombreuses revalorisations du SMIC depuis le Covid ont propulsé le nombre de smicards à un record, plus de 17 % des salariés. Avec pour conséquence, des grilles conventionnelles de salaires écrasées. Un coup de pouce d'ici au 1er janvier prochain renforcerait le problème sans éviter la nécessité de réformer l'articulation des salaires, comme le réclame l'U2P.
source : les echos